Exemple de développement de commentaire (Don Quichotte)


Commentaire d’un extrait de Don Quichotte (développement) :

Dans cette scène, une contradiction oppose Don Quichotte et Sancho Panza. Ils ne voient pas la même chose. Cette opposition se manifeste dès le début par un dialogue. Les paroles sont rapportées au style direct. Don Quichotte désigne à son écuyer des géants qu’il s’apprête à combattre. Sancho ne comprend pas tout de suite l’erreur de son maître. Puis, il s’efforce de le détromper. Chacun va utiliser des arguments pour essayer de convaincre l’autre. Premier argument de Sancho : les prétendus « bras (…) de presque deux lieues de long » sont en fait des « ailes » que le vent fait tourner. Mais cet argument ne convainc pas Don Quichotte. Il réplique par deux autres arguments. D’une part, Sancho ne s’y connaît pas en « aventures ». En effet, Sancho est écuyer depuis peu et il n’a pas lu de romans de chevalerie. D’autre part, Sancho est peut-être sujet à la peur : « si tu as peur (…) va te mettre en oraison ». Cependant, l’écuyer ne cède pas aux arguments de son maître. Lorsque Don Quichotte se lance à l’attaque, Sancho tente de l’arrêter : « Sancho (…) lui criait qu’à coup sûr c’étaient des moulins à vent et non des géants qu’il allait attaquer ». Tel est le premier échange entre les deux hommes. Chacun reste sur sa position. Ce n’est pas le cas dans le deuxième échange. Celui-ci se produit une fois Don Quichotte désarçonné. Cette fois, son échec l’oblige à réviser son jugement. Un deuxième dialogue en style direct permet de confronter les points de vue. Sancho commence par clamer qu’il avait raison. Le maître lui impose le silence : « Paix, paix ! »  Mais sa position a changé. Il prétend que l’enchanteur Freston a « changé ces géants en moulins ». Ainsi, il concilie les deux points de vue contraires. En somme, il fait une concession à son écuyer. A présent, Sancho n’a pas tout à fait tort. Les apparences sont pour lui. Mais si l’on ne voit que les apparences, on est dans l’erreur. Bien que transformés par l’enchanteur, ce sont toujours des géants. On voit donc que la contradiction du début se modifie. C’est sa chute qui oblige Don Quichotte à réviser son jugement. Il se plie au verdict des faits. Mais il conserve sa folie. Il interprète donc la leçon des faits en trouvant une raison tirée des romans : la magie d’un enchanteur. En somme, chacun garde son système d’interprétation. La contradiction n’est que partiellement résolue.
Dans cette scène, Cervantès met en évidence la folie de son héros au moyen de plusieurs procédés. Tout d’abord, comme on l’a vu, par le dialogue. Les propos de Don Quichotte révèlent sa folie. Il s’exprime comme un héros de roman de chevalerie. On trouve en effet le champ lexical de  la chevalerie avec les mots « guerre », « aventures », « bataille », « oraison », « chevalier », « dame », « gloire », « épée » et l’expression « servir Dieu ». A ce lexique s’ajoutent des noms propres tels que Briarée, Freston ou Dulcinée, qui relèvent soit de la mythologie soit de l’univers chevaleresque. Le mot « géant », lui aussi, est du domaine du roman. Tout cela reflète l’univers mental de Don Quichotte. Un autre trait de sa folie se manifeste par l’hyperbole. Il a tendance à exagérer ce qu’il perçoit. Les moulins sont de « démesurés géants ». Certains, dit-il, ont des bras de « presque deux lieues de long ». Une lieue faisant environ quatre kilomètres, c’est évidemment tout à fait excessif. De plus, il prête à ces géants « plus de bras que le géant Briarée », personnage qui possédait cent bras. Il affirme qu’il livrera une « terrible bataille ». L’adjectif n’est pas à la mesure du piètre assaut qu’il mène. L’expression « tel péril » est du même acabit. Il y a aussi exagération dans le mal et le bien. Son univers mental de pseudo-chevalier se partage entre le bien qu’il incarne et le mal qu’incarnent les géants. L’auteur utilise une série de termes évaluatifs pour mettre en évidence cette opposition. Du côté des termes péjoratifs, on peut relever les expressions « si mauvaise engeance », « lâches et viles créatures » et « art maudit ». A l’opposé, on trouve les mots « la bonté de mon épée » qui montrent que l’arme du chevalier est d’une qualité supérieure. L’adjectif « bonne » qui qualifie sa « guerre » indique que, selon lui, son combat est juste. De même, l’adverbe « grandement » renforce l’idée du service de Dieu auquel le chevalier doit se vouer. A ces hyperboles et à ces termes évaluatifs s’ajoutent des termes d’un niveau soutenu tels que « oraison » pour prière. L’ensemble donne au langage du héros une certaine grandiloquence qui dénote sa folie, son enthousiasme délirant. Le dialogue permet donc à l’auteur de faire ressortir le contraste entre les deux personnages et ainsi de mettre en valeur la folie du héros.

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