samedi 22 juin 2019

Réponses manquantes à deux questions de la liste

Dans quelle mesure un texte en prose est-il un poème ? (séquence poésie)
Un texte en prose peut être un poème ou il peut être plus ou moins poétique. 
Étymologie du mot poème (d'après le dictionnaire Littré) : Latin poema, du grec ποίημα, poëme, de ποιεῖν, faire : la chose faite (par excellence).
Le Littré donne ce sens au mot (deuxième sens) : S'est dit quelquefois d'un ouvrage de prose où l'on trouve les fictions, le style harmonieux et figuré de la poésie. 
"Harmonieux" s'applique au rythme et aux sonorités d'un texte. "Figuré" signifie que le texte comporte ds figures de style assez nombreuses (notamment métaphores, comparaisons, métonymies, synecdoques, oxymores, hyperboles, etc.)
Donc un texte poétique en prose doit être agréable à l'oreille (autrement dit plus ou moins musical) et imagé. 
Cela dit, depuis le XXe siècle, les poèmes en prose ne sont pas toujours musicaux ou harmonieux. Mais ils comportent des figures et donnent une place importante à la fantaisie ou à l'imagination. 
Par extension, on peut dire de n'importe quelle œuvre littéraire dont la forme est particulièrement belle qu'elle est un poème. "Les Misérables sont un vrai poème" (Rimbaud, Œuvres, Lettre à Demeny,)

État de nature et état social (séquence argumentation) :
L'état de nature est l'état supposé de l'humanité avant l'instauration d'une société avec ses règles. Les philosophes ont créé cette notion au XVIIe pour définir le droit naturel (les droits fondamentaux de tout être humain à n'importe quelle époque et dans n'importe quel pays). En effet, les sociétés réelles (ou positives) diffèrent selon les époques et les pays. Mais pour ces philosophes il faut définir un droit qui ne change pas et qui est le même pour tous (un droit étalon). Ce droit invariant se fonde sur l'état de nature. L'état de nature est donc le commun dénominateur ou le principe de toutes les différentes formes de société qui existent. Par exemple, vous pouvez comparer les différentes législations sur la propriété dans différentes sociétés : leur point commun et leur origine, leur principe est le droit naturel de chaque homme à la propriété (fondée selon Locke sur le travail). Selon Locke et Rousseau la loi naturelle est celle de la raison. En effet à l'état de nature il n'existe aucune loi positive c'est-à-dire instituée oralement ou par écrit par les hommes.

vendredi 14 juin 2019

Dom Juan, sc.2, acte I (tirade sur l'inconstance)

Don Juan
Quoi ! tu veux qu’on se lie à demeurer au premier objet qui nous prend, qu’on renonce au monde pour lui, et qu’on n’ait plus d’yeux pour personne ? La belle chose de vouloir se piquer d’un faux honneur d’être fidèle, de s’ensevelir pour toujours dans une passion, et d’être mort dès sa jeunesse à toutes les autres beautés qui nous peuvent frapper les yeux ! Non, non, la constance n’est bonne que pour des ridicules ; toutes les belles ont droit de nous charmer, et l’avantage d’être rencontrée la première ne doit point dérober aux autres les justes prétentions qu’elles ont toutes sur nos cœurs. Pour moi, la beauté me ravit partout où je la trouve, et je cède facilement à cette douce violence dont elle nous entraîne. J’ai beau être engagé, l’amour que j’ai pour une belle n’engage point mon âme à faire injustice aux autres ; je conserve des yeux pour voir le mérite de toutes, et rends à chacune les hommages et les tributs où la nature nous oblige. Quoi qu’il en soit, je ne puis refuser mon cœur à tout ce que je vois d’aimable ; et, dès qu’un beau visage me le demande, si j’en avais dix mille, je les donnerais tous. Les inclinations naissantes, après tout, ont des charmes inexplicables, et tout le plaisir de l’amour est dans le changement. On goûte une douceur extrême à réduire, par cent hommages, le cœur d’une jeune beauté, à voir de jour en jour les petits progrès qu’on y fait, à combattre, par des transports, par des larmes et des soupirs, l’innocente pudeur d’une âme qui a peine à rendre les armes, à forcer pied à pied toutes les petites résistances qu’elle nous oppose, à vaincre les scrupules dont elle se fait un honneur, et la mener doucement où nous avons envie de la faire venir. Mais lorsqu’on en est maître une fois, il n’y a plus rien à dire ni plus rien à souhaiter ; tout le beau de la passion est fini, et nous nous endormons dans la tranquillité d’un tel amour, si quelque objet nouveau ne vient réveiller nos désirs, et présenter à notre cœur les charmes attrayants d’une conquête à faire. Enfin il n’est rien de si doux que de triompher de la résistance d’une belle personne ; et j’ai, sur ce sujet, l’ambition des conquérants, qui volent perpétuellement de victoire en victoire, et ne peuvent se résoudre à borner leurs souhaits. Il n’est rien qui puisse arrêter l’impétuosité de mes désirs : je me sens un cœur à aimer toute la terre ; et, comme Alexandre, je souhaiterais qu’il y eût d’autres mondes pour y pouvoir étendre mes conquêtes amoureuses.

mercredi 5 juin 2019

Libertinage philosophique dans Dom Juan

Dans la scène 1 de l'Acte III, Sganarelle interroge son maître sur ses croyances. Don Juan ne croit ni au Ciel, ni à l'enfer, ni au diable ni à l'autre vie. Lorsque le valet lui demande en quoi il croit, il lui répond : "Je crois que deux et deux sont quatre (...) et que quatre et quatre sont huit". 

Le mot de Don Juan provient d'une anecdote rapportée par quelques auteurs de l'époque. Dans le manuscrit des Historiettes de Tallemant on lit : 

On conte une chose assez notable de la fin de ce grand homme [Maurice de Nassau, prince d’Orange, fils de Guillaume le Taciturne, grand-oncle du roi d’Angleterre Guillaume III]. Étant à l'extrémité, il fit venir un ministre [un ecclésiastique protestant] et un prêtre et les fit disputer de la religion ; et après les avoir ouïs assez longtemps : “Je vois bien, dit-il, qu'il n'y a rien de certain que les mathématiques*” ; et, ayant dit cela, se tourna de l'autre côté, et expira.

*[Note de Tallemant] On conte d'un prince d'Allemagne, fort adonné aux mathématiques, qu'interrogé à l'article de la mort par un confesseur s'il ne croyait pas, etc. : “Nous autres mathématiciens, lui dit-il, croyons que 2 et 2 font 4, et 4 et 4 font 8.” 

Sganarelle lui oppose un argument qui est celui de la cause première : il faut bien qu'il y ait une cause à l'existence du monde : le monde, dit-il, "n'est pas un champignon qui soit venu tout seul en une nuit". Le monde ne peut découler de rien. Il faut selon Sganarelle qu'il y ait eu ce que Voltaire appellera plus tard un "grand architecte". On pourrait opposer à Sganarelle qu'une cause de l'existence du monde ne doit pas nécessairement être un Dieu, un esprit tout-puissant qui le conçoive. Mais Sganarelle ajoute dans sa tirade qu'il y a "quelque chose d'admirable dans l'homme", il énumère des organes en s'émerveillant de la complexité harmonieuse du corps humain. De cet émerveillement on peut tirer l'idée implicite que seul un être intelligent comme Dieu a pu engendrer quelque chose d'aussi complexe et harmonieux. Le hasard ne peut avoir produit un corps et un univers aussi bien organisés. Ce dernier argument est un argument finaliste (il faut un être capable d'une intention pour arranger les moyens d'atteindre une fin et l'univers ou l'homme sont le résultat d'un arrangement extrêmement complexe de moyens). Les deux arguments que l'on peut tirer de la tirade de Sganarelle sont des arguments philosophiques classiques et bien connus. Cependant, ces arguments sont très discutables et ils ne convainquent pas Don Juan qui se moque du raisonnement de son valet.

On voit donc dans cette scène 1 de l'Acte III que Don Juan ne croit pas en Dieu. Certains libertins à l'époque étaient athées d'autres étaient déistes ou sceptiques. Les athées nient l'existence de Dieu, les déistes reconnaissent son existence mais n'admettent aucun des dogmes des religions. Les sceptiques, eux, se refusent à se prononcer, ils considèrent que le savoir humain ne peut trancher. La position de Don Juan n'est pas claire dans la pièce car il ne répond pas catégoriquement. Il élude la question de Sganarelle : "Est-il possible que vous croyiez point du tout au ciel?" en répondant : "Laissons cela". Il est possible qu'il soit athée mais qu'il préfère ne pas le déclarer explicitement car c'est dangereux. Il se peut aussi qu'il soit sceptique comme l'auteur de la formule selon laquelle rien n'est certain que les mathématiques.

jeudi 30 mai 2019

La tirade sur l'hypocrisie (Dom Juan, V, 2)


Dom Juan Acte V scène 2 (L’apologie de l’hypocrisie)
I : Introduction
- Molière : auteur dramatique, directeur de troupe, metteur en scène, acteur
- reçoit une pension royale
- une fois de plus les dévots censurent une partie de Dom Juan
- la pièce va être réécrite pour être « politiquement correct »
- première représentation de la pièce devant le roi : 1665
- Molière a écrit rapidement cette pièce pour remplacer Tartuffe
- Molière a repris un personnage existant, le créateur de Dom Juan est Tirso de Molina un auteur espagnol (1620)
Résumer brièvement les actes précédents
- Quelles sont les raisons d’être de cette tirade ?
A : L’art de la rhétorique de DJ
B : La portée polémique de la tirade

II : Développement
A : L’art de la rhétorique de DJ
- DJ a besoin d’une tirade pour développer son argumentation
- Emploi de figures de style : personnification : « vice privilégié, qui de sa main, ferme la bouche », métaphores : « un bouclier du manteau de la religion », « rhabillé », « abri » contribuent à l’efficacité de sa parole
- Emploi du pronom « on » et usage de tournures impersonnelles (parce que ce sont des vérités générales on = tout le monde)
- Termes appréciatifs : « le meilleur », « merveilleux », « sage esprit »
- Emploi du subjonctif pour le superlatif : ex : « qu’on puisse »
- Présent de vérité générale
- Formules sentencieuses « qui en choque un, se les jette tous sur les bras »
- Question rhétorique : « Combien crois-tu que j’en connaisse » (pas une vraie question)
- Références + ou - implicites aux dévots « les gens du parti », « toute la cabale », « zélés indiscrets »
1e partie de la tirade : argumentation : thèse : il faut être hypocrite
Arguments :
1. ce n’est pas honteux car c’est à la mode
2. l’hypocrisie présente plusieurs avantages :
- On n’ose pas attaquer ce vice
- On est défendu soutenu par tous les dévots les faux et les vrais solidarité
- Beaucoup de gens ont utilisé ce vice pour être impunément méchants
3. c’est sage de s’adapter à son siècle
2e partie de la tirade : emploi du « je » et du futur : projet d’appliquer le principe de l’hypocrisie : stratégie de défense
La meilleure défense c’est l’attaque :
« Je m’érigerai en censeur des actions d’autrui », « je pousserai mes ennemis, je les accuserai d’impiété »
B : La portée polémique de la tirade
- Dans cette tirade 3 critiques différentes sont faites :
- critique de l’hypocrisie : longue critique de son pouvoir social (1ère partie de la tirade), et de son immoralité (2ème partie de la tirade), Diptyque avec la scène 1 de l’acte V : l’effet précédé la cause, DJ fait fonctionner les signes dévots avant d’en faire l’analyse, c’est un véritable pamphlet = expression contestataire
- critique des faux dévots : allusion à la censure explicite et à la cabale contre Tartuffe
- critique sociale : image cinglante de la société du 17ème siècle où « tous les vices à la mode passent pour vertu »
- Il y a aussi un langage théâtral = l’hypocrite est un comédien, la société est un théâtre (mise en abyme) : champ lexical du théâtre : « jouer », « grimaces », « stratagèmes », « singe »
- mimiques du comédien : « quelque baissement de tête, un soupir mortifié, et deux roulements d’yeux »
III : Conclusion
- choix dramaturgique = volonté de Molière de condamner la fausse dévotion et désir de refonder la société sur la sincérité et la vertu
- Faux dévot = faux signes d’une relation avec le divin

mercredi 29 mai 2019

Sur le texte de Cyrano

Voici l'exposé d'Axelle et Antion (revu et corrigé) suivi d'une analyse de l'argumentation :

1) Ce commentaire portera sur un extrait de L’autre monde ou Les Etats et empires de la lune datant de 1650. L’auteur de ce roman est de son nom complet Savinien Cyrano de Bergerac. Cyrano est un écrivain français né à Paris et mort le 28 juillet 1655 à Sannois. Le roman a été publié deux ans après la mort de Cyrano par son ami Henry Le Bret. Le commentaire s’appuiera sur trois axes le premier sera la thèse défendue, le deuxième sera l’argumentation et le troisième la contre-argumentation. Tout en répondant à la problématique suivante : Comment l’argumentation apparaît-elle dans cet extrait ?
Tout d’abord l’extrait est un dialogue entre Cyrano et un autre personnage débattant sur la thèse suivante: “Existe t-il un Dieu ou pas ?” Ce dialogue est écrit à la première personne d’un point de vue interne. Le narrateur est à la fois auteur et personnage. Car Cyrano est l’auteur de ce récit et se met lui-même en scène sans changer de nom. Les opinions sont réparties par personnage, Cyrano pense que Dieu existe et l’autre personnage pense que non.
Cyrano apparaît en situation de faiblesse par rapport à l’autre personnage et manque de répartie :  “Eh ! je n’ai rien à répondre…” L.1 L’extrait laisse donc supposer que le débat, voire la joute verbale, a déjà débuté bien avant le début de l’extrait. C’est un débat entre un religieux et un non religieux.
Le postulat de départ pour Cyrano est que Dieu existe. Il utilise d’abord un argument d’autorité en évoquant « les démonstrations évidentes dont se sont servis les philosophes pour l’établir ». « Je ne m’amuserai point, lui dis-je, à vous réciter les démonstrations évidentes dont les philosophes se sont servis pour l’établir : il faudrait redire tout ce qu’ont jamais écrit les hommes raisonnables. » Pour Cyrano c’est utile de croire, cela ne coûte rien et c’est une certaine sécurité dans le cas où Dieu existerait. « Puisque donc il est impossible d’en tirer que de l’utilité, que ne vous le persuadez-vous ? »
Cyrano essaye de défendre sa croyance mais reste faible sur ses positions et à est court d’arguments. On sent qu’il ne trouve pas de raisons valables de croire.
Pour Cyrano ne pas croire serait désobéir au précepte divin. « Car s’il y a un Dieu, outre qu’en ne le croyant pas, vous vous serez mécompté, vous aurez désobéi au précepte qui commande d’en croire… »
L’autre personnage rejette l’argument de la désobéissance car cet argument est déduit d’une hypothèse qui reste à démontrer. “N’allez pas si vite, me répliqua-t-il, vous en êtes déjà à « Dieu l’a dit » ; il faut prouver auparavant qu’il y ait un Dieu, car pour moi je vous le nie tout à plat. “  L 1-2
Dès sa première réplique on constate que l’adversaire de Cyrano ne croit pas en Dieu, il attend des preuves, une utilité.
Pour lui il est impossible de désobéir à quelque chose dont on ignore l’existence, selon lui il est impossible de pécher car il faut le savoir ou le vouloir.
Si fait, me répondit-il, j’en serai mieux que vous, car s’il n’y en a point, vous et moi serons à deux de jeu ; mais, au contraire, s’il y en a, je n’aurai pas pu avoir offensé une chose que je croyais n’être point, puisque, pour pécher, il faut ou le savoir ou le vouloir.” L 6-8
Par ailleurs, il montre sa supériorité sur Cyrano car il explique que si Dieu n’existe pas alors il est mieux que lui. “Si fait, me répondit-il, j’en serai mieux que vous, car s’il n’y en a point…”
Il se montre même injurieux envers Dieu “sot” et  “malicieux”.
Selon lui Dieu est fautif de son incroyance car il n’est pas doté d’organes et d’esprit capable de le comprendre. “Et si, au contraire, il m’eût donné un esprit incapable de le comprendre, ce n’aurait pas été ma faute, mais la sienne, puisqu’il pouvait m’en donner un si vif que je l’eusse compris.” Comme il n’y a aucune preuve de son existence, c’est que Dieu n’a pas voulu que l’homme connaisse avec certitude son existence.


2) Dans les lignes précédentes, Cyrano et son interlocuteur ont débattu de la résurrection. Son interlocuteur n’y croit pas.
Cyrano répond par ce syllogisme : 1. Dieu ne peut mentir. 2. Or Dieu a dit que la résurrection existe. 3. Donc, la résurrection existe.
L’interlocuteur objecte que ce syllogisme a un préalable non démontré : l’existence de Dieu.
Cyrano répond par un argument d’autorité en évoquant les démonstrations des philosophes. Mais au lieu de refaire une démonstration de l’existence de Dieu, il renonce à prouver cette existence et il change de question. Il ne s’agit plus d’établir si Dieu existe ou pas mais de savoir s’il est plus avantageux d’y croire ou pas (c'est là la problématique pascalienne du pari).
Alors, il invoque l’absence d’inconvénient de la croyance en Dieu. Pour lui absence d’inconvénient signifie utilité (ce qui est faux puisqu’une chose dépourvue d’inconvénient peut être inutile).
Cyrano ajoute un troisième argument. Son raisonnement est le suivant (la deuxième proposition est une hypothèse) : 1. Vous ne croyez pas en Dieu. 2. Or Dieu existe. 3. Donc vous vous trompez et vous lui désobéissez.
Si l’on prend l’hypothèse contradictoire (pour la mineure) cela donne : 1. Idem. 2. Or Dieu n’existe pas. 3. Vous n’avez aucun avantage sur le croyant.
L’athée répond : Si Dieu n’existe pas nous serons à égalité (« à deux de jeu »). Il est donc d’accord sur la conclusion du dernier syllogisme de Cyrano. Mais il n’est pas d’accord avec le syllogisme précédent (hypothèse : Dieu existe). En effet, dit-il, on ne peut désobéir à quelqu’un dont on ne connaît pas l’existence.
L’athée ajoute un autre argument : Si Dieu existait et qu’il était utile de croire, alors Dieu nous aurait donné les moyens de croire (il sous-entend que Dieu est bon par définition et que donc il ne peut vouloir nous priver d’un avantage). L’athée montre ainsi que Cyrano a tort d’affirmer l’utilité de la croyance. En effet, en affirmant qu’il est utile de croire, il contredit l’existence de Dieu puisque Dieu dans sa bonté ne pourrait priver les hommes de croyance. L’athée utilise donc un argument ad hominem : il se sert de l’argument de l’utilité de Cyrano pour contredire la thèse de l’existence de Dieu. Il montre ainsi que Cyrano s’est pris à son propre piège en invoquant l’utilité de la croyance. En effet cela revient à dire : Dieu existe parce qu’il est avantageux de le penser et Dieu n’a pas donné à tous les hommes cet avantage donc soit Dieu n’existe pas soit il n’est bête ou méchant, ce qui revient à dire qu’il n’existe pas en tant qu’être parfait. On ne peut pas soutenir à la fois qu'il existe un Dieu bon et qu'il est utile de croire en lui, c'est une contradiction puisque tous les hommes ne croient pas en lui.

lundi 27 mai 2019

Exposé d'élève sur la tirade sur l'hypocrisie

Commentaire de texte : Dom Juan Acte V Scène II
INTRODUCTION :
Dom Juan est une tragi-comédie de Molière, jouée pour la première fois au théâtre, au Palais Royal, le 15 février 1665. La pièce est représentée 15 fois et remporte un vif succès.
Mais cependant, Molière s’étant attaqué à la religion, par le personnage de Don Juan, le parti des dévôts organise une cabale contre la pièce et son auteur et fait interdire la pièce qui ne sera rejouée.
Dom Juan, est un grand seigneur de Sicile. Il se considère comme athée et est fier de son libertinage Une seule femme ne lui suffit pas, et après avoir épousé Done Elvire, il s’empresse de l’abandonner pour aller séduire d’autres femmes, dont Charlotte et Mathurine (Acte II scène 4).
Don Juan a fait croire à son père qu’il s’était converti à la religion. Il s’agit d’une comédie. Cependant, il prétend avoir compris les leçons passées et il semble revenir dans le droit chemin. Son père est tout heureux de cette conversion. Nous-mêmes, en tant que spectateurs pourrions être convaincus.
Il s’agit d’un simulacre et Don Juan n’a en fait aucune intention de se convertir. Il continue à penser en libertin et reste athée (1). Intérieurement, ses dispositions n’ont pas changé.
Dans cette tirade Don Juan avoue à son valet, Sganarelle qu’il a menti à son père. Il explique à son fidèle valet les raisons qui l’ont amené à choisir l’hypocrisie.
Tout d’abord, nous verrons comment Don Juan manie l’art de la rhétorique, et ensuite nous analyserons l’éloge qu’il fait de l’hypocrisie.
I : Don  Juan maître du langage

Don Juan avoue à Sganarelle qu’il a décidé de pratiquer l’hypocrisie pour être tranquille. Il veut rester maître de sa vie sans personne pour lui dicter sa conduite.
Maître de la rhétorique, Don Juan est sûr de lui et ses arguments semblent irréfutables :
Tout d’abord il tente de persuader son interlocuteur et le public. Il s’adresse à Sganarelle et lui dit clairement ce qu’il pense. Il parle de la cabale, ces "gens du parti" (les dévots) qui jouissent d’une tranquillité, car ils sont devenus maîtres dans l’art de l’hypocrisie. Il demande à son valet « combien crois-tu que j’en connaisse, qui, par ce stratagème, ont rhabillé adroitement les désordres de leur jeunesse » et qui sont selon Don Juan, sont « les plus méchants hommes du monde ? ».
Afin de renforcer son argumentation, Il utilise également le présent de vérité générale et généralise avec des termes comme « tous », « il », « l’homme de bien », « ceux ». Afin de renforcer la généralisation, il s'exprime par ailleurs avec des aphorismes (proverbes) tel que « qui en choque un se les jette tous sur les bras » ou « c’est ainsi qu’il faut profiter de la faiblesse et qu’un sage d’esprit s’accommode des vies de son siècle ». Sûr de ses propos, il crée des images fortes chez le spectateur à l’aide de nombreuses métaphores, comme par exemple « grimaces », « les singes  », "le manteau". Ces images renforcent son idée de l’hypocrisie.

II : L’éloge de la l’hypocrisie

Au début de la tirade, Don Juan cherche à prouver les vertus de l’hypocrisie qui constitue selon lui un véritable stratagème pour vivre en paix.
Selon Don Juan, cette conversion est un moyen de se protéger dans la société.
Pour être tranquille il suffit de jouer un personnage, il peut ainsi « mettre en sûreté » ses « affaires ».
Lorsque Don Juan s’adresse à Sganarelle, au début de cette tirade il énonce des idées générales avec notamment le pronom indéfini « on ». Il fait passer l'hypocrisie pour une vertu : "tous les vices à la mode passent pour vertus". Selon lui, utiliser l’hypocrisie est un « abri favorable ». Il va même plus loin encore en décidant de s’ériger comme « censeur ». De cette manière, il serait totalement libre de vivre comme il l’entend, sans que personne ne le juge dans sa conduite où il se sent tout puissant.
Dans son siècle, tout le monde l’adopte et il ne voit pas pourquoi lui ne pourrait pas utiliser ce qu’il qualifie de « profession ». Il confirme son argumentation en élevant l’hypocrisie au rang de « vice privilégié qui de sa main, ferme la bouche à tout le monde ». Il se considère comme pas plus condamnable qu’un autre et il semble normal qu’il soit lui aussi hypocrite. Il se considère au-dessus du ciel et se verrait bien en « vengeur des intérêts du ciel ». Dans cette tirade, de nombreux termes mélioratifs et des hyperboles renforcent les effets de l’hypocrisie.
Il joue le « meilleur de tous les personnages », il obtient de « merveilleux avantages ». C’est un art, un vice privilégié, un abri favorable.
L’hypocrisie (toujours selon Don Juan) est un art qui inspire le respect. L’hypocrite peut agir en toute liberté car pratique crée des liens avec la société : « on lie (...) une société étroite avec tous les gens du parti ». Il traite les faux dévots de « plus méchants hommes du monde ». Il démontre qu’en se mettant à l’abri, grâce à l’hypocrisie il pourra continuer son libertinage sans être jugé ou condamné par la société.
Il considère de plus qu’un « sage esprit » comme lui doit s’accommoder du vice de son siècle et en tirer tous les avantages. Il est conscient de l’immoralité de ses actes, cela ne l’empêche pas de se proclamer « censeur » des actions d’autrui. 

Conclusion :
Dans cette tirade, Molière met en scène une personne qui a l’art de manier les mots et qui prononce un discours contraire aux valeurs traditionnelles. Il choisit ouvertement de bafouer la religion mais également de jouer hypocritement le rôle du dévot. Sur le plan humain, il atteint le sommet de la scélératesse. Cette tirade se présente comme un éloge, mais elle permet surtout à Molière de critiquer la société de son temps et notamment de s’attaquer aux dévots. Le Tartuffe avait été interdit par les dévots et Dom Juan subira le même sort. 
(1) Pour rappel, le clergé et les dévots condamnent et persécutent les libertins. Louis XIV n’aimait pas non plus les libertins pour des raisons politiques.
Un acte de libertinage pouvait être sanctionné par la prison, l’exil ou le bûcher.
En 1629, le clergé et les dévots avaient fondé la Compagnie du Saint Sacrement. Cette association dissoute en 1665, groupait des laïcs et des ecclésiastiques. Certains grands noms comme Bossuet, Anne d’Autriche… Cette société pieuse était soutenue par le pape. Elle se voulait charitable, philanthropique, apostolique, moralisante. Elle accueillait les malheureux. Des hôpitaux généraux avaient été construits
Louis XIV se méfiait de la puissance de la Compagnie du Saint Sacrement, mais comme sa mère Anne d’Autriche en faisait partie, et parce qu’il devait soutenir certaines personnalités du royaume il n’avait pas le choix et il devait composer.
Elle se comportait comme une véritable cabale : cette association se livrait à des complots et on l’appelait la Cabale des dévots.

jeudi 16 mai 2019

Dom Juan, acte III, scène 2


Fiche bac français : Dom Juan, 2ème extrait Acte III scène 2 (La rencontre du Pauvre)
I : Introduction
- Molière : auteur dramatique, directeur de troupe, metteur en scène, acteur
- reçoit une pension royale
- les dévots censurent une partie de Dom Juan
- la pièce va être réécrite pour être « politiquement correcte »
- première représentation de la pièce devant le roi : 1665
- Molière a écrit rapidement cette pièce pour remplacer Tartuffe
- Molière a repris un personnage existant, le créateur de Dom Juan est Tirso de Molina, un auteur espagnol (1620)

- SG présente DJ à Gusman
- Dispute entre DJ et Don Elvire
- Dialogue entre Pierrot et Charlotte, sa fiancée
- DJ aperçoit Charlotte et lui fait la cour puis, la cour à son amie, en présence de SG
- Des hommes recherchent Don Juan, qui s'enfuit en échangeant ses vêtements avec SG
- Discussion de SG et DJ au sujet de leurs croyances
- Le pauvre est un ermite (= homme pieux qui subsiste grâce aux aumônes).
- Forêt : Lieu de perdition : 2 sens : - perdre son chemin, son argent
                                                          - perdre son salut (de l’âme)

- Comment la scène développe-t-elle une arithmétique de l’échange ? (cette scène = calcul = échange = équitable)
A : La progression dramatique de la scène
B : L’opposition entre foi et raison
II : Développement
A : La progression dramatique de la scène
- scène = bcp d’échanges entre DJ et le pauvre
- 1er échange : Sganarelle demande le chemin au pauvre. Le pauvre lui indique le chemin et prévient SG et DJ qu’il y a des brigands qui rôdent.
- 2ème échange : DJ le remercie et lui dit qu’il est son obligé
- Alors le pauvre lui demande une aumône.
- Reproche de DJ puis justification du pauvre qui explique l’arithmétique de l’échange pour lui (échange triangulaire : riche > pauvre > Dieu > riche).
- Irritation de DJ qui ne veut pas faire affaire avec Dieu. DJ essaie donc de convaincre que le système ne peut fonctionner car selon lui Dieu n’existe pas :
- 1er argument : Pourquoi ne pas demander à Dieu de l’aider sans passer par un intermédiaire ? SG intervient et rappelle que DJ ne croît qu’en 2 et 2 font 4.
- DJ utilise la maïeutique de Socrate : au lieu de chercher la confrontation, il pose des questions pour lui faire prendre conscience tout seul de l’absurdité de sa croyance.
- 2e argument : « Tu te moques : un homme qui prie le Ciel tout le jour ne peut pas manquer d’être bien dans ses affaires ».
- Réaction du pauvre : Il n’a pas bien compris et ne fait que répéter ce qu’il a dit
- 3ème échange : 1 Louis d’or = 200 euros, le pauvre est très pieu et très misérable, il est dans un dilemme : « Soit j’ai un louis d’or avec lesquels je vie pendant des mois mais je fais un péché mortel soit je sauve mon âme et je reste dans le mystère »
- DJ est un joueur, il joue avec le vieil homme, il veut forcer le pauvre à renier dieu
- Pour amener le pauvre à pécher, il répète plusieurs fois son incitation (4x le verbe jurer à l’impératif)
- Mais le pauvre ne pèchera pas
- DJ au final lui donne le louis d’or par amour de l'humanité
- L’échange dans cette scène fait monter la pression
B : L’opposition entre foi et raison
- Opposition, pauvre = foi, DJ = la raison
- Les deux parties ne sont pas égales, inégalité sociale = influence
- Marché de DJ pas équitable, 1 louis d’or contre le châtiment éternel
- Pauvre résiste et rejette la tentation (comme le Christ dans la Bible, dans le désert où il est tenté par Satan)
- DJ modifie le marché pour marquer son athéisme, il fait un don pour l’amour de l’humanité (donne le louis d’or)
- amour de l’humanité = philanthropie (morale qui remplace Dieu par l’homme, les humains doivent s’entraider)
- C’est pour cela que cette scène a été censurée = tentation de Satan
- Cette scène est donc un affrontement entre un libertin et un croyant
- DJ est cynique, il joue avec la pureté du pauvre et profite donc de sa supériorité pour tenter de briser sa foi
III : Conclusion
- Cette scène très célèbre malgré sa brièveté
- elle a fait scandale => impiété
- Elle a été censurée.
- Dom Juan va prendre un visage plus sympathique à la fin de la scène mais reste odieux toute au long de celle-ci.